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On ne peut pas faire toutes ses études en Guyane

Près de 40% des jeunes Guyanais, entre 18 et 24 ans, sont hors du système scolaire avec au mieux, le brevet des collèges comme diplôme. Christophe Madère gère depuis septembre 2014 un dispositif d’insertion appelé Seconde chance à la Ceméa (Centre d’entraînement aux méthodes d’éducation active), un mouvement d’éducation populaire présent en Guyane depuis 62 ans.

Rencontre avec Christophe Madère, directeur territorial des Ceméa Guyane.

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En quoi consiste le dispositif Seconde chance ?

Le dispositif Seconde chance dépend du PLIE (Plan local pour l’insertion et l’emploi), qui met des formations à disposition d’un public en difficultés d’insertion, qui a quitté l’école sans diplôme et souhaite reprendre une activité scolaire ou professionnelle. À travers lui, les Ceméa proposent de former des animateurs scolaires pour les villes de Guyane qui ont mis en place des activités périscolaires. En juin 2015, une vingtaine de stagiaires, âgés de 20 à 30 ans, ont obtenu un certificat de qualification professionnelle d’animateur périscolaire.

 

Pourquoi est-il important de donner une seconde chance ?

Dans un parcours de vie, on peut parfois faire des mauvais choix. Ce n’est pas pour autant qu’on est voué à ne rien faire de bon. Le dispositif permet d’aider ceux qui ont arrêté l’école à rebondir. Cela peut être des jeunes filles qui sont tombées enceintes et qui n’ont pas réussi à poursuivre leurs études, ou bien des garçons qui ont pris un mauvais chemin à l’adolescence. Certains n’avaient pas compris l’intérêt de l’école car, avec le système scolaire tel qu’il est, on n’en saisit pas toujours la finalité tout de suite. Ce n’est que plus tard que certains réalisent qu’il est important d’avoir une formation pour exercer une profession qui leur plait. On a tous besoin d’une seconde chance, d’une opportunité de changer et de pouvoir s’améliorer.

 

Les Guyanais plus que les métropolitains ?

Les Guyanais sont dans le système français. On leur dit qu’ils ont droit à tout, mais ils se rendent compte que ce n’est pas le cas. Par exemple, on ne peut pas faire toutes ses études en Guyane. Les choix d’orientation sont très limités. L’Université de Guyane n’a été créée qu’en janvier 2015 ! Si on veut poursuivre son cursus, à un moment, il faut partir s’installer en Guadeloupe, en Martinique ou en métropole. Or, un jeune n’a pas forcément les moyens, ni l’envie de partir. Partir signifie vivre loin de sa famille, loin de ses repères culturels et sociaux. On doit choisir entre rester dans le pays qu’on aime, où on a ses habitudes, et partir pour pouvoir se construire. On n’est pas à égalité de chances et de moyens avec la métropole. Beaucoup de bons élèves quittent la Guyane et échouent dans leurs études, parce qu’ils ne réussissent pas à s’adapter à leur nouvelle vie dans l’Hexagone, où tout est différent. Les Guyanais sont Français, mais nous n’avons pas les mêmes repères. Et ça compte beaucoup pour la réussite scolaire !

 

Liens

L’association CEMEA Guyane

Diagnostic de l’Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE) « L’état de l’école en Guyane: des progrès à poursuivre »